WILLEMSTAD (CURAÇAO) — Haïti sera au rendez–vous de la Coupe du Monde 2026. Mardi soir, au Stadion Ergilio Hato, les Grenadiers ont dominé le Nicaragua 1–0 et pris la tête du Groupe C des éliminatoires de la zone Concacaf. Combiné au match nul 0–0 entre le Honduras et le Costa Rica, ce succès envoie officiellement la sélection haïtienne au Mondial, pour la première fois depuis 1974.

L homme du but s appelle Louicius. L avant–centre haïtien a fait basculer la rencontre en seconde période, concluant une action collective venue du couloir par une frappe maîtrisée. Déjà décisif plus tôt dans la campagne, il inscrit là l un des buts les plus importants de l histoire récente du football haïtien.

Le contexte comptable était clair avant le coup d envoi. Haïti devait l emporter face au Nicaragua et espérer que le Honduras ne gagne pas contre le Costa Rica, ou bien creuser suffisamment l écart à la différence de buts si les deux rivaux s imposaient. En réalité, le scénario a été plus simple: le Honduras et le Costa Rica se sont neutralisés, tandis que les Grenadiers ont assuré l essentiel en Curaçao.

Cette qualification a une portée symbolique immense. La dernière apparition d Haïti en phase finale de Coupe du Monde remontait à 1974, en Allemagne de l Ouest, marquée par le but d Emmanuel Sanon face à l Italie qui avait mis fin à l invincibilité de Dino Zoff. Durant plus de cinq décennies, la sélection est souvent passée tout près, sans réussir à franchir le dernier palier.

Face au Nicaragua, Haïti a affiché une identité de jeu claire: bloc médian compact, maîtrise des espaces intérieurs, transitions rapides et centres en retrait plutôt que ballons flottants. Les latéraux ont choisi soigneusement leurs montées, les milieux ont contrôlé le rythme, et la ligne défensive a géré les appels adverses sans paniquer.

La première période a vu Haïti se procurer les meilleures situations. En combinant dans les demi–espaces, les Grenadiers ont plusieurs fois trouvé des fenêtres de centres tendus vers le point de penalty. Sur coups de pied arrêtés, la charnière a pesé dans la surface, obligeant le Nicaragua à défendre très bas. De son côté, Johny Placide a rassuré derrière, captant sereinement frappes lointaines et centres aériens.

Le but libérateur après la pause est venu récompenser cette domination. Récupération haute, circulation rapide vers l aile, centre ras de terre en retrait, et Louicius qui surgit au bon timing pour pousser le ballon au fond. L explosion de joie sur la pelouse et dans les tribunes disait tout: ce n était pas un but ordinaire, mais l instant où un rêve de cinquante ans prenait enfin forme.

Une fois devant au tableau d affichage, Haïti a géré. Sébastien Migné a ajusté l occupation du milieu pour mieux protéger l espace derrière les latéraux et a injecté de la fraîcheur sur les côtés pour conserver une menace en transition. L équipe a su casser le rythme, provoquer des fautes loin de sa surface et défendre les coups francs et corners avec une concentration maximale.

Dans les tribunes, au pays et au sein de la diaspora, la nouvelle du 0–0 entre le Honduras et le Costa Rica a déclenché une vague supplémentaire d émotions. À Port–au–Prince, dans les villes de province comme dans les communautés haïtiennes de Montréal, Miami, New York ou Paris, banderoles et drapeaux se sont levés pour célébrer ce retour sur la scène mondiale.

Très vite, le staff et la Fédération devront se projeter vers la suite: tirage au sort du Mondial, planification des stages, programmation de matches amicaux de haut niveau. Mais cette soirée restera gravée à part. Sans jouer à domicile, dans un contexte national difficile, les Grenadiers ont trouvé les ressources pour tenir une campagne exigeante et franchir la ligne d arrivée. Haïti est de retour en Coupe du Monde, et ce chapitre s écrit déjà comme l un des plus beaux de son histoire footballistique.