Compte rendu : Honduras 3–0 Haïti — Éliminatoires Coupe du Monde (13 oct. 2025)

TEGUCIGALPA — Haïti a vécu un « away-day » typique de la zone CONCACAF, où la marge d’erreur est infime et chaque renversement de jeu peut devenir létal. En vingt-trois minutes, le Honduras a frappé à trois reprises (Rivas 18’, Lozano 26’, Quioto 39’) et s’est détaché irrémédiablement. Les Grenadiers, organisés en 4-4-2 médian, avaient pourtant bien entamé la rencontre en fermant les demi-espaces et en coupant les passes intérieures, mais la précision hondurienne dans les appels de rupture a fissuré le plan initial.
Le premier but illustre la bascule: perte du second ballon côté haïtien, orientation rapide vers le couloir droit, Rivas s’engouffre entre les centraux et conclut du droit. Derrière, Haïti doit avancer d’un cran pour presser la première relance et se retrouve plus exposé dans le dos des latéraux. Le Honduras capitalise immédiatement en multipliant les renversements pour isoler ses attaquants dans les canaux.
À la 26e, Anthony Lozano double la mise. Luis Palma attire la ligne, fixe, puis glisse une passe dans l’intervalle pour l’attaquant qui coupe la trajectoire sur l’épaule du défenseur. Finition clinique. Cette séquence résume la supériorité locale sur les micro-détails: orientation du corps, premier contrôle vers l’avant, et lecture de l’espace faible sur le temps juste.
Romell Quioto, à la 39e, scelle la soirée avant la mi-temps. Son appel « troisième homme » au second poteau prend de vitesse la défense haïtienne après une attaque initiée à droite et renversée à gauche. En trois coups, le bloc hondurien a aspiré la ligne adverse et frappé dans la zone de vérité. À la pause, les Grenadiers doivent autant réparer mentalement que tactiquement.
Au retour des vestiaires, l’entraîneur haïtien ajuste: plus d’agressivité à la perte pour récupérer haut, insertion de jambes fraîches sur les côtés pour allonger les courses verticales, et volonté d’impliquer le point d’appui axial afin de fixer la charnière. Ces choix rapportent quelques fenêtres, notamment sur des centres en retrait et des frappes à l’entrée de la surface, mais la dernière passe échappe trop souvent aux visiteurs.
Défensivement, Haïti retrouve des repères: meilleure protection de la zone 14, couverture plus prudente des latéraux lors des montées, et densité accrue au cœur du jeu. Le gardien sécurise plusieurs ballons aériens, la charnière gagne des duels clés, et les contre-pressings à la perte deviennent plus synchronisés. Reste que chaque déséquilibre exposait encore la transition hondurienne, toujours dangereuse par la vitesse de ses excentrés.
Sur coups de pied arrêtés, le plan hybride (zonal sur la ligne des 6 mètres + marquage individuel sur les menaces) a limité les têtes faciles. En attaque placée, les livraisons haïtiennes vers le point de penalty ont souvent manqué de second ballon, faute d’une occupation optimale de la surface. La précision dans les projections des milieux — arriver lancés plutôt que statiques — constituera un axe de progression évident.
Au registre individuel, plusieurs signaux restent encourageants. Le milieu sentinelle a lu proprement les renversements et bloqué de nombreuses passes verticales. Le latéral gauche a mieux géré l’arbitrage montée/prudence après la pause. L’ailier droit, en rentrant sur son pied fort, a généré des tirs mi-distance et provoqué des fautes utiles. Mais la connexion entre l’avant-centre et les « 8 » a manqué pour transformer les séquences de fixation en occasions nettes.
Collectivement, la leçon du soir renvoie à la vitesse d’exécution plus qu’au volume de possession. Dans cette poule, face à un adversaire qui excelle à déplacer le bloc et attaquer le dos des latéraux, Haïti devra accélérer sur la deuxième touche, clarifier les responsabilités lors des changements de côté, et installer une « rest-defense » à deux plus couverture pour neutraliser les courses diagonales adverses.
Sur le plan du classement, le revers complique la route mais ne la barre pas. La différence de buts hondurienne s’envole, tandis que les Grenadiers devront optimiser les matchs à venir — en particulier à domicile — pour rester dans la lutte au barrage, voire pour contester la première place si le calendrier s’ouvre. L’important sera de convertir les séquences de domination courte en xG réels par de meilleurs timings d’appels et des centres plus tendus.
Enfin, l’aspect mental comptera. Le groupe a déjà prouvé sa capacité à voyager et à tenir des contextes hostiles. Revenir aux fondamentaux — discipline du bloc, transitions nettes, set-pieces travaillés — permettra de retrouver l’élan. La défaite à Tegucigalpa rappelle surtout que, dans les qualificatifs, l’issue se joue souvent en vingt minutes: savoir ralentir le match quand il s’emballe et reconnaître les signaux faibles avant la vague.
Conclusion: Haïti sort battu mais pas défait dans ses intentions. Le modèle de jeu reste pertinent — bloc médian compact, verticalité utile, pressing déclenché — à condition d’y ajouter une précision chirurgicale dans la surface adverse et une vigilance maximale sur les renversements côté faible. La suite des éliminatoires offrira d’autres opportunités pour valider ces ajustements.